Mahjoub Ben Bella est un artiste peintre et dessinateur franco-algérien né le 20 octobre 1946 à Marnia en Algérie et mort le 11 juin 2020 à Lille en France.
Après des cours à l'école des Beaux-Arts d'Oran, Ben Bella arrive en France dans le département du Nord en 1965 (année de ses 19 ans). Entre 1965 et 1970, il poursuit ses études à l'école des Beaux-Arts de Tourcoing. Il passe ensuite à l'école nationale des Arts décoratifs à Paris puis à l'école nationale supérieure des Beaux-Arts aussi dans la capitale. Il enseigne par la suite à l'école des Beaux-Arts de Cambrai.
En 1975, Ben Bella retourne à Tourcoing, y aménage son atelier et s'y installe définitivement.
Sa peinture est principalement abstraite et très colorée. Beaucoup de ses peintures utilisent la calligraphie arabe.
En 1986, il peint L'Envers du Nord, une œuvre utilisant comme support la chaussée de Paris-Roubaix sur plusieurs tronçons formant un ensemble de 12 kilomètres de voie pavée.
En 2000, il peint 1 800 carreaux de céramique destinés à la station Colbert à Tourcoing du métro de l'agglomération lilloise.
Il signera ces oeuvres Ben Bella ou plus rarement M. Ben Bella.
Ils ont dit de lui...
« En 1986, il peint les célèbres pavés du Paris-Roubaix, L'envers du Nord, fresque routière de 12 kilomètres (35 000 mètres carrés). Ce tapis de signes, ce rouleau d'écritures, n'est que l'une des métamorphoses d'un imaginaire calligraphique générateur de son espace pictural. (...) Ben Bella procède à un "dérèglement systématique" de la calligraphie arabe pour en faire l'espace d'une peinture capable d'investir de sa minutie la magie des tablettes et des talismans, et de l'ampleur de sa rythmique le format gigantesque des toiles. La calligraphie développe en contrepoint la répartition des taches colorées et l'économie répétitive de la ligne, comme une chorégraphie désynchronisée dont les écarts ouvrent des vertiges, comme une polyphonie dont les discordances hallucinent.
Ce que cette transe doit à la musique, ses amis compositeurs le savent. Ce que cette "véhémence des signes" doit à l'histoire reste au secret de leur illisibilité : dans tels "talismans" cousus, les journaux contemporains de la guerre d'Algérie tiennent lieu de texte sacré. »
Marie-Odile Briot, Dictionnaire d'art moderne et contemporain, Hazan, Paris
. « Ce que l'on distingue d'abord dans sa peinture, c'est bien sûr le signe. Sa répétition. Sa résonance comme s'il s'agissait d'un chant incantatoire. Mais le propos de Mahjoub Ben Bella n'est pas d'illustrer ou de suivre les traces illustratives d'une quelconque calligraphie arabe. Non ! Il en traduit simplement une musicalité qui trouve son rythme aussi bien dans le trait que dans la couleur. La partition s'égrène de part en part, lancinante et vibrante de tous les sons. Bousculant le silence de la monochromie, il couvre la toile jusqu'à l'excès, la frappe du sceau de ses croches, l'embellit de tonalités chantantes. Il la transporte dans une abstraction syncopée et linéaire. Dépassant parfois cette simple tonalité, il tente de nous perdre dans le bruissement même de la vie, dans des paysages frémissants, des stridences retenues.
Connu pour ses fresques routières dans le nord de la France, Ben Bella a recouvert de ses signes 12 kilomètres de pavé. Dans ses toiles, il compose des champs sacrés dont les sillons nous entraînent au-delà du simple lyrisme. Il se laisse posséder par le vertige de l'écriture jusqu'à l'extase. Jusqu'à devenir le chantre d'un livre de prières à la gloire même de l'art. »
Jean-Louis Pinte, (Les champs sacrés de Ben Bella, Figaroscope)
« Longtemps réglées par la graphie arabe, les créations de Mahjoub Ben Bella n'en ont conservé peu à peu que le matériau pictural, donnant à voir une œuvre dense qui s'inscrit dans un double héritage : celui de la calligraphie arabe et de la peinture européenne. Qu'il joue sur la profusion des motifs ou sur les performances de sa gamme chromatique, l'artiste crée un constant et minutieux dialogue du signe et de la couleur. »
Mustapha Laribi, Algérie à l'affiche, 1998)
"L'artiste Mahjoub Ben Bella s'est éteint à Lille, entouré de ses proches, au terme d'un long et courageux combat contre la maladie. Je m'associe à la peine de sa famille, de son épouse Brigitte et de ses enfants, Souhir et Nadjib.
J'ai bien connu Mahjoub Ben Bella. J'aimais son œuvre intense, lumineuse et sensible. Peintre délicat, il peignait ses rêves et nous les offrait en partage. Formé dans les écoles des Beaux-arts d'Oran, puis à Tourcoing et à Paris, il s'installe en France, dans le Nord gris et chaleureux qui, rapidement, l'adopte. Ce Nord accueillant, Mahjoub Ben Bella l'illuminera des couleurs, de la lumière de sa Méditerranée natale et de son pays, l'Algérie qui coulait passionnément dans ses veines. Peinte neuf jours avant sa disparition, sa dernière peinture sur son lit d'hôpital en est la parfaite illustration.
Il fut un peintre virtuose aux multiples facettes. Parallèlement à ses grandes et petites peintures sur toile, sur papier, sur bois ou sur pavés, il réalisera des céramiques, des objets, des gravures, des performances et des fresques monumentales dans des lieux publics. En 1986, il peindra les célèbres pavés du Paris-Roubaix, L'envers du Nord, fresque routière de 12 kilomètres, véritable tapis de signes, rouleau magique d'écritures. En juin 1988, il rendra à Wemblay un fraternel hommage à Nelson Mandela. Expositions personnelles et collectives dans de nombreux musées, centres d'art et galeries d'Europe, du Proche-Orient et une rétrospective au MAMA d'Alger, Mahjoub Ben Bella a été représenté dans vingt musées et collections publiques.
Grâce à la Donation Claude & France Lemand, le musée de l'Institut du monde arabe est riche de seize de ses éclairantes peintures. Très prochainement, nous mettrons à l'honneur, dans le musée de l'Institut, cet immense et universel artiste."
Jack Lang, Article publié le15/06/2020